jeu de juin à la petite fabrique
Je ne prends plus jamais le métro, ni un bus, ni un train toute seule.
Plus jamais.
Cela remonte à loin.
Je marche, je sais c’est un peu tendance en ce moment de marcher, mais je suis une pionnière en la matière, voilà des années que j’use mes baskets sur l’asphalte entre mon quartier et la Défense où je travaille.
Quand j’arrive à destination, je m’installe pour un petit noir. On se connaît bien entre habitués et même si parfois un barman s’en va, un autre arrive, il ne faut guère de temps pour l’adapter à nos besoins.
Je me lève toujours très tôt afin de papoter un moment avec tout mon monde. Ensuite j’enlève mes baskets et mes chaussettes, j’enfile jupe, bas et talons, aux toilettes évidemment. J’ai un grand sac en bandoulière ultra léger pour tous mes accessoires de vie sociale. Et le soir, je me change au bureau, très vite, dès que l’heure a sonné d’entreprendre les trottoirs. Dix kilomètres aller-retour sous les semelles préservent une silhouette. Mais pour que mes pieds s’assagissent, il a fallu trouver les bonnes chaussures, j’ai tâtonné longtemps, mes orteils s’en souviennent en cors.
Cette mode des talons est une torture, mais il serait malvenu de passer la porte sans tenue adéquate : cravates pour les sieurs, talons pour les dames. Les codes vestimentaires dans les hautes sphères de la bureaucratie des multinationales s’ils sont issus d’une courtisanerie, n’en sont pas moins obligatoires si vous voulez garder votre poste, y compris le plus infime des postes de secrétaire ou de standardiste.
Quand j’atteins mon bureau, une lettre de la direction prône devant l’écran. Tout à coup j’ai des sueurs chaudes, très chaudes. Période pré-ménopause sans doute, sans doute pire. En effet pire. On me notifie un entretien, et un entretien hors saison des entretiens, c’est-à-dire en mai, n’est pas bon signe. Deux heures devant moi à me ronger la pensée.
Je ne claque pas la porte du DRH, mais c’est tout juste. On avait eu les bruits de couloirs sur une restructuration, mais nos postes ne devaient pas être touchés. Je suis mutée ou virée. Au choix ! Je recevrai ma lettre recommandée d’ici peu. Je suis mutée aux Ulis ! C’est-à-dire à perpette. De toute façon je ne peux pas y aller à pied, je déteste le vélo et me sens incapable de conduire un engin quelconque… et je n’irai pas en train. Impossible ! J’ai une frousse panique des transports en commun depuis que je me suis endormie dans le métro. Et je ne vois pas mon Jeannot m’accompagner tous les matins et venir me chercher les soirs.
Je m’étais endormie, et quand je me suis réveillée j’étais dans le noir du wagon, tout était calme, tout était vide. Et j’étais seule, très seule sans pouvoir sortir, totalement impuissante devant les portes hermétiques. J’ai frappé fort à la vitre, j’ai hurlé, j’ai hurlé si férocement qu’on m’a entendue. Le chauffeur est revenu, furieux, il venait de terminer son travail, j’étais au terminus. Il m’a ramenée jusqu’à la première rame en fonction. J’étais au bord de l’apoplexie. Je suis sortie sur le quai à toute allure, c’était une question de survie et j’ai grimpé avec une rapidité hors les normes les marches vers la sortie.
De l’air ! Cette impression de n’avoir pu respirer pendant tout ce temps… de l’air. Une gentille dame a appelé les secours car je me suis évanouie. C’était comme un terminus aussi dans ma tête.
Alors les Ulis… je ne vois pas comment m’y rendre si ce n’est en montgolfière, mais ça ne courent pas le ciel ces engins et pour se garer sur mon balcon… même pas en rêve !
Job en l’air, tête à l’envers… évasion.
Finalement je rêve jusqu’à midi devant mes dossiers. Ma décision est prise, entre eux et moi c’est aussi terminus. Qu’ils se débrouillent. Je leur laisse mes talons si ça peut les aider.
Un terminus n’est jamais qu’une étape tant qu’on ne verrouille pas les portes… en soi.
Elle a des pieds qui ont des jeux de mots facétieux 🙂
J’aime la conclusion, il y a toujours d’autres possibilités qui s’offrent à nous tant que nous restons attentifs et ouverts pour les voir.
Contente de te relire enfin, Polly!
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Tout reste ouvert quand on a en soi suffisamment de passion pour la vie.
Merci pour ta fidélité.
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Mais je ne savais pas pour ton anniversaire tout court! Bon anniversaire Polly, je t’embrasse 🙂
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Je t’ai écrit là-bas, mais j’ajouterai ici que je suis heureuse de te relire aussi. 🙂
T’embrasse fort ma Polly.
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merci de prendre tout ce temps pour mes insignifiants vagabondages.
Tendresse ma Quichott’
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J’ai commenté sur la petite fabrique, mais je prends le temps de venir te faire un petit coucou jusqu’ici. Et puisque je crois avoir compris que c’est aussi l’anniversaire de ton blog, je lui souhaite un bon anniversaire, avec toujours cette belle qualité de plume.
Bonne soirée
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C’était mon anniversaire tout court… oups! que le temps nous échappe! Bisous Annick.
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Alors c’est à toi que vont tous mes vœux amicaux de bon anniversaire 🙂
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D’abord je fais la méchante : souvent enchantée par tes écrits, je bute pourtant sur les fautes d’orthographe… Ici je n’en ai trouvé qu’une, c’était fluide ! Alors maintenant la gentille : les jeux de mots sont bien intégrés dans le fil du récit, ça me plaît (juste la lettre qui prône m’a un peu dérangée, mon côté vieille schnock) (c’est l’âge). Je suis toujours épatée par tes sujets et les idées qui vont avec ! Mais oui continue d’écrire, je te lis avec plaisir ! et bon anniversaire au blog ? et à la blogueuse bien sûr… Bises
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Ravie de te trouver un peu entre mes fautes d’orthographe et mes mots mal choisis. Mais si tu te souviens bien au collège mes zéro en dictée jusqu’à ce que Mademoiselle Heurtier (Hurtier?) nous condamne à tous les exercices du bled. Je me suis améliorée et je venais de loin. Et je n’ai plus mon correcteur attentif, mon immortel comme je l’appelais, pour s’amuser de mes errances. Et je connais cet agacement que tu peux avoir (qui n’a rien de méchant), j’ai corrigé tant et tant de copies lamentables que je m’en suis sans doute imprégnée (j’avoue que parfois il me fallait un dico, car la faute revenait dans de nombreuses copies, alors je doutais de moi… et je doute souvent). 🙂
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Ah ah Miss Hurtier !!! Au collège je me rappelle surtout qu’on écrivait des romans entiers !!!! (cf « La femme aux gants noirs »… c’était toi ? ou Françoise ?) BISES
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Je ne me souviens d’aucun de mes romans! J’ai tout jeté jusqu’à mes cours de fac! Ce titre me rappelle surtout Françoise. Est-ce que tu as des échos de ce qu’elle est devenue?
Bisou
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j’aime ton texte ….et j’adore ta conclusion….un terminus peut aussi nous mener vers une ouverture ….
bises
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Merci Églantine, effectivement il y a encore à faire après un terminus sauf s’il est définitif. 😉
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J’étais passée hier et je repasse aujourd’hui devine pourquoi ? (sourire)
Un texte bien mené frangine du tonnerre de diou, un terminus qui me plait bien, bizouilles
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Oh! Yes! Maladroite que je suis! Merci d’être revenue, et tu t’es bien reconnue dans ce terminus?
Hahaha!
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Oui, quelquefois, on arrive au terminus. Et c’est le moment de claquer la porte, en claquant des talons, pour prendre ses cliques et ses claques.
Moi aussi, je me suis endormie une fois dans un train. C’est une expérience très destabilisante que je n’ai pas oubliée.
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Je pense qu’il y a ainsi des phases dans une vie, où il est nécessaire d’avancer autrement, en sortant d’un train qui ne va plus où on voudrait aller.
Merci pour ce commentaire qui claque parfaitement. 🙂
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